ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ
En Afrique et partout ailleurs, le pagne s’impose dans la mode, sous de nouvelles matières tels que la soie, la viscose ou la maille, mais également depuis quelques années dans la décoration….
MAIS QU’EST-CE QUE LE WAX ?
A la base, c’est un coton qui est décoloré, une concoction de cire et de résine.
Le pagne qui fait le buzz actuellement est originaire du mot espagnol pano qui veut dire morceau d’étoffe ou pan d’étoffe ou de matière végétale tressée (ex raphia) de forme rectangulaire avec lequel une personne se couvre les hanches jusqu’aux cuisses ou aux genoux
Il est le fruit de l’union entre l’Europe, terre de naissance et l’Afrique qui a su en faire usage.
Pour la petite histoire, le premier wax fabriqué en Hollande, nommé Marianne, fut introduit en Côte d’Ivoire il y a 150 ans. L’effet fut immédiat, et en 1934, Van Vlissingen (dont le nom de l’entreprise Vlisco s’inspire) notait qu’à Grand Bassam, « la plupart de la population porte des tissus Van Vlissingen ».
Cependant avant d’être un succès, le wax a connu des débuts très difficiles, comme au Ghana (qui était alors une étape sur la route des Indes), les navigateurs Hollandais espéraient faire un troc facile de tissus indonésiens contre denrées et richesses naturelles de la Côte d’Or, mais ils s’aperçurent vite que les pagnes javanais de coton très fin ne répondaient pas aux exigences locales, et donc les échantillons proposés furent refusés. Les commerçants hollandais durent donc entreprendre de fabriquer eux-mêmes des wax adaptés aux critères d’esthétique et de qualité de la côte ouest-africaine.
Ainsi, on ne peut parler d’une ‘tradition ’véritable mais de l’adoption et de l’adaptation d’un textile créé pour la demande locale.
La fabrication du wax est donc l’amalgame de techniques d’origine indonésienne, hollandaise, et ouest-africaine
De ce fait, on distingue deux catégories de pagne : le tissu pagne imprimé et le tissu pagne tissé qui est un moyen d’expression culturelle regroupant la tradition les pratiques populaires, comme ici chez nous le kita, où les tissés des tisserands de Korhogo.
C’est ainsi que l’on décèle plusieurs types.
Mais seuls le Bogolan dont l’utilisation est la plus courante de nos jours et est dessiné par les femmes maliennes, tandis que le wax hollandais tissu le plus arboré par les femmes en Afrique et le Woodin qui s’étend jusqu’à l’ameublement, sont les plus reconnus dans le monde.
EXPRESSIONS DES CULTURES, DES TRADITIONS, D’UNE AFRICANITÉ AFFIRMÉE
Le pagne devient une expression multiculturelle, et surtout chez nous en Côte d’Ivoire depuis plusieurs années maintenant. On l’utilise dans nos tenues vestimentaires pour tous les jours, pour aller au bureau, au travail, en promenade, ou dans des cérémonies. C’est également un tissu qui se veut unisexe.
Les messages et les noms que on lui attribue, se réfèrent à la vie quotidienne, la modernisation, la culture populaire ou aux relations conjugales. Un pagne devient un classique lorsqu’il est nommé ; il est alors incontournable, et doit figurer dans une garde-robe qui se respecte.
Par ailleurs, ces pagnes servent la continuité régionale dans le pays : un pagne classique se décline en plusieurs variantes de couleurs. Les préférences varient selon la région, les couleurs latérites sont plus répandues dans le nord, tandis que les couleurs vives dominent dans le sud. Puisque le nom se réfère au motif, et non à la couleur, un pagne nommé est comme une chanson populaire : il marque son époque, devient une référence commune.
MODERNITÉ
Tout le monde se met au pagne, les grands couturiers et stylistes africain, comme Pathé O, Diop, Aya Konan, mais aussi le couturier libano-ivoirien Elie Kuamé y taille les silhouettes échancrées de ses « hyper-femmes », ainsi qu’une collection pour les 170 ans du groupe Vlisco.
A l’international, la Grecque Marie Katrantzou en fait des fourreaux de soirée, tandis que la maison néerlandaise Viktor & Rolf réinterprète Van Gogh façon pagne à travers des minirobes bouffantes aux épaules nues. En 2014, l’artiste Stromae et sa femme, la styliste Coralie Barbier, créent leur ligne de vêtement, Mosaert. Une série de capsules qui s’appuie sur le design wax pour mettre en musique des patrons anglais à la coupe juste, selon une fabrication « responsable » : de petites quantités produites en Europe, à partir de matériaux sains et traçables.
Vous trouverez en cliquant sur ce lien un article qui vous informe sur des marques qui mettent vraiment en valeur le textile et en font également bénéficier au plus démunie :
https://www.glamourparis.com/mode/shopping-tendance/diaporama/tendance-wax-6-marques-qui-mettent-lafrique-a-lhonneur/51665#6-marques-qui-mettent-lafrique-a-lhonneur-6
Les grandes maisons de luxe s’approprient également le wax, comme Stella McCartney, qui le décline en camaïeu de verts pour des robes ultraféminines, amples et serrées à la taille, ou épaules nues, à volants, pour un effet princesse très premier degré. Les robes asymétriques de Dries Van Noten l’ont assagi, et les grandes chemises souples pour hommes, chez Balenciaga, l’interprètent façon années 1980.
Le wax se détourne toujours bien.
Entré dans les usages vestimentaires, le wax est « devenu authentiquement africain, s’amuse-t-elle, puisqu’il est prisé d’un bout à l’autre du continent, aussi bien par les hommes que par les femmes de tous les âges. Il est le symbole d’une Afrique métissée, plutôt moderne, résultat des interactions avec l’Europe et l’Asie, mais aussi au sein du continent. » Anne Grosfilley, anthropologue et auteur du livre-somme Wax & Co., anthologie des tissus imprimés d’Afrique (éditions La Martinière).
Il est également à l’origine de tout un secteur économique, avec l’émergence, à partir des années 40, des Nana Benz. Ces négociantes en tissus, redoutables femmes d’affaires, constituent une bourgeoisie commerçante dans les décennies 70 et 80, marquant la culture populaire. Elles affichent alors les mêmes signes de réussite que les hommes, d’où leur surnom, « Benz », tiré des Mercedes au volant desquelles elles sillonnent les routes. L’inénarrable Dédé Rose Creppy, une pionnière des Nana Benz, reste, à 80 ans passés, sur le marché de Lomé, au Togo, la doyenne d’un business essoufflé.
CONCURRENCE ET CONTRE FAÇON
Car la concurrence de la production chinoise à bas coût a fini par écraser les fabriques tant européennes qu’africaines, lesquelles avaient essaimé dans le sillage des Nana Benz, et ont pour la plupart fermé. Vlisco, seule rescapée de la splendeur passée du wax hollandais, tente de maintenir quelques sociétés sœurs de son groupe sur le sol africain. Tandis que l’anglaise ABC Wax a déplacé sa ligne de production au Ghana en 2005. Les dernières manufactures authentiques doivent faire face à des imitations non autorisées de leurs dessins, véritable pillage de propriété intellectuelle. C’est aux irrégularités du tissu que l’on reconnaît un vrai wax hollandais, ou sa version luxe, plus épaisse, le « super wax ». Il se revend au détail dans chaque quartier africain des métropoles, insensible aux modes. Si ce n’est que les créateurs se l’approprient désormais, entre hommage familial et liberté créative
L’AFRIQUE À L’HONNEUR DANS LA DÉCORATION
J’avais fait un précédent article sur le wax dans la décoration, découvrez-le ou redécouvrez :
https://wordpress.com/block-editor/post/lecoindesartisansdabidjanci.com/1426
À la fois gai, coloré et varié, cet imprimé ethnique est parfait pour apporter le petit grain de folie qui manquait à votre intérieur. Après la décoration presque monochrome et apaisante du style scandinave, le tissu wax est remis au goût de jour grâce aux différentes inspirations ethniques qui réveillent le monde de la déco. D’ailleurs de nombreuses marques et designers ne s’y sont pas trompés, n’hésitant pas à le décliner sur différents supports.
Pour réussir une déco cohérente et chaleureuse grâce au célèbre tissu, le secret est d’apporter de petites touches subtiles. Et le choix est vaste.
On n’a pas fini de créer et de découvrir le wax, car par les possibilités sont infinis avec les graphismes, les couleurs, les formes…….pour tous.
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